Jules TELLIER
La Guirlande de Julie
Luis CASINADA
Editions Luis Casinada
Montpellier, 2013
10 ème volume de la collection Parce que !
à Olivier Louis Angus, ce livre à peine un peu plus pour lui que les autres
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La Guirlande de Julie aux Editions Luis Casinada |
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La Guirlande de Julie aux Editions Luis Casinada |
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Délicate punkasserie sur le boitier : la tête de mort des vanités... |
Alors là, on y est allé franco.
Tout part de la trouvaille d'un texte iconoclaste et brillant de Jules TELLIER. Le manuscrit de La Guirlande de Julie est en vente à Drouot. C'est le livre de toutes les prétentions. Initié par le quasi-stupide prétendant de Julie, il se prétend lui-même la 8e merveille du monde. Or, 250 ans après sa création, c'est un texte mort, comme il l'a sans doute toujours été. Nul et archi-nul. Il n'en reste qu'une carcasse, pour bibliophiles nécrophiles. Tellier signe l'avis de décès littéraire de ce fatras de banalités.

Nous autres, bibliophilies, savons que nous sommes mortelles...
Essayer aussi de voir ce qui pourrait être sauvé.
Voici le texte de Jules Tellier (1863-1889) :
La guirlande
de Julie
(Le Parti national, 27 novembre 1887)
(Le Parti national, 27 novembre 1887)
Le marquis de Sainte-Maure Montausier vient de mourir.
Il se peut que la chose vous laisse au premier abord assez froids. Voici où
elle prend quelque intérêt. Le marquis était le descendant direct du
Montausier qui présida à l'éducation du fils de Louis XIV, et que, suivant
quelques uns, Molière peignit en Alceste. Il possédait la célèbre Guirlande
de Julie qu'offrit son aïeul à Julie d'Angennes. La Guirlande est
maintenant à l'hôtel Drouot. Elle y sera exposée publiquement le 4 décembre
et vendue le 5. Atteindra-t-elle l'énorme prix de quatorze mille cinq cents
livres auquel un Anglais l'acheta lors de la vente de la bibliothèque du duc
de la Vallière ? Montera-t-elle plus haut encore ? Et qui en sera l'acquéreur
? J'imagine que ces graves questions tourmentent en ce moment plus d'un des
collègues du délicieux Sylvestre Bonnard. Et ceux-là même qui ne peuvent
songer à acquérir la précieuse relique (et qui peut-être n'y songeraient
point s'ils le pouvaient), auront plaisir au moins à l'aller contempler une heure,
et ont plaisir, en attendant, à se détourner des choses présentes (qui sont
tristes) pour songer aux amours légendaires de Montausier et de Julie.
L'avouerai-je pourtant ? Ce Montausier ne me frappe
guère et ne m'attire point, encore que le grand siècle ait vu en lui le
modèle accompli de l'honnête homme. Trop de choses me le gâtent. Il voulait
qu'on envoyât les satiriques rimer dans la rivière, ce qui prouve peu
d'entente de la charité, et il voulait qu'on batonnât La Ménardière pour
n'admirer point Chapelain, ce qui prouve peu d'entente de la poésie. La Pucelle
était son livre de chevet, et c'est apparemment pourquoi Massillon l'appelle
" l'arbitre du bon goût " et " l'ennemi du faux ". Cette
éducation du dauphin qui devait être sa grande oeuvre il la manqua tout à
fait. Je ne sais s'il lui lut trop Chapelain, mais il réussit à lui inspirer
une horreur durable pour les lettres et à en faire un dévot de cervelle
bornée. pour son indépendance il la manifeste surtout en faisant fouetter son
élève, audace dont Bossu et demeurait saisi. La bastonnade, la noyade et le
fouet, cet homme ne sortait point de là. Apparemment, il ne pensait point
comme Montaigne qu'on peut aller à la sagesse par un chemin fleuri. Qu'il ait
été irréprochable en ses mœurs, je le veux. Mais on peut être irréprochable
et insupportable, et il semble que ce fut son cas. il ne fut qu'un bourru
sans générosité et sans grandeur. Les rudesses de Mézeray, par exemple,
m'apparaissent tout autrement fières que les siennes. Jamais il ne parla si bien
qu'au sortir de la première représentation du Misanthrope." Plût
au ciel, disait-il, que je ressemblasse à un si honnête homme que cet Alceste
! " Et plût au ciel qu'il lui eût ressemblé en effet ! Il eût été moins
confiant en Tartuffe et moins épris d'Oronte.
Mais Montausier eut ce bonheur d'être amoureux. C'est
sa tenace passion pour Julie d'Angennes qui éclaire encore d'un rayon sa
figure maussade ; et c'est grâce à elle seulement que je suis en train de
vous parler de lui...
Montausier " soupira " dix ans pour Julie.
L'histoire de ces temps-là est pleine de ces longues amours patientes, tout
épurées et comme immatérielles. Elle doit bien étonner M. Zola, ou le laisser
incrédule, si d'aventure il la lit. Il y avait dix ans que Montausier
soupirait, quand le 1er janvier 1641, il offrit à Julie la Guirlande.
Et ce cadeau fut une merveille dont se récrièrent tous les beaux esprits du
temps ; et Julie en fut si touchée qu'elle ne réfléchit plus que quatre ans
avant de " couronner la flamme " de son amoureux.
La Guirlande est un manuscrit in-folio, sur
papier vélin. La reliure, très riche, en maroquin rouge, est l'œuvre de Le
Gascon. Elle porte les initiales de J. L. (Julie Lucine). aux faux titre, une
guirlande de fleurs, et au milieu " la guirlande de Julie ". Puis
trois feuillets blancs et une miniature compliquée. On y voit le vent
Zéphyrus au milieu d'un nuage. Il a une rose à sa droite, et à sa gauche une
guirlande de vingt-neuf fleurs qu'il souffle sur la terre. Sur chacun des
trente feuillets suivants, une des trente fleurs est répétée, et une ou
plusieurs pièces de vers dont elle est le sujet l'accompagne. Les pièces sont
au nombre de soixante-deux en tout. Il y en a de Tallemant et de Scudéry, de
Malleville et de Racan, et même du silencieux Conrard. Connaissez-vous les
vers de Saint-Sorlin sur la violette ? Ou ceux de Tallemant sur le lis ?
Sinon ce n'est point un grand malheur, et je ne vous les infligerai pas. Car
il faut l'avouer : la reliure de Le Gascon est belle, les miniatures de
Robert sont divertissantes, la calligraphie de Nicolas Jarry est admirable ;
c'est une toute charmante et gracieuse idée que de faire célébrer tour à tour
la bien-aimée par toutes les fleurs (notez que l'excellent poète Maurice
Bouchor l'a reprise à la fin d'un de ses plus beaux livres) et la Guirlande
de Julie serait enfin le modèle idéal des cadeaux du nouvel an, et le
plus parfait des " valentines ", si seulement les vers en étaient
passables. Mais les plus vantés de ces madrigaux sont la fadeur même ; et les
seize qui appartiennent en propre à Montausier valent encore moins que le
reste.
Au fait, il ne faut rien dédaigner tant. Nos madrigaux,
à nous, sensuels et panthéistes, vieilliront comme ont vieilli ceux de nos
pères.
Qu'un grand seigneur riche (s'il en reste), ait demain
l'idée de composer un recueil à quelque Julie d'Angennes (s'il en reste
encore), et qu'il demande pour cela de petits vers à nos Parnassiens, à nos
Décadents, à nos Symbolistes : êtes-vous assurés que le recueil ferait si
bonne figure dans deux cents ans ?
Et puis, que la Guirlande de Julie soit ou non
un recueil médiocre elle ne s'en vendra pas à Drouot un sol de plus ni de
moins. L'homme qui achète quatorze mille cinq cents livres un manuscrit de
vers, se soucie fort peu des vers qu'il contient. Et les amateurs de vers ne
se soucient point des manuscrits côtés à tels prix. Les plus curieux lisent
tout bonnement la Guirlande dans l'édition qu'en a donnée Didot en
1808, - et les plus sages ne la lisent pas du tout.
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Julie D'Angennes. |
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Frontispice de La Guirlande de Julie |
La page de titre nous a donné le cadre dans lequel nous pourrions nous agiter.
Schématisée, cent fois sur le métier passée à la gouge du linograveur (Sébastien HERVOUET), nous allions nous y projeter, et le miroir qui est en frontispice de notre édition renvoie notre image, et celle de qui veut bien être complice - et receleur - de notre détournement.
Ici, le miroir est devenu un soleil noir. Remercions le scanner qui nous ramène dans le grand baroque des années Louis XIII ou dans les Chimères de Nerval, les deux nous conviennent.
Mais la guirlande, vieux rose, est là.
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Couverture de "notre" Guirlande |
Le frontispice du manuscrit, un zéphyr lançant ses fleurs comme des flèches, nous y voyions un peu des éclairs de lumière, des grisailles de nuages, et toujours ce cercle de belles précieuses qui emprisonnait tout. Forçait à tourner en rond dans la ruelle du lit, enchaînés au carcan de la rhétorique.
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Frontispice du manuscrit de La Guirlande |
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Soleil et nuages |
Et toujours la guirlande s'effritait, perdait des plumes et des fleurs.
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Le labyrinthe rhétorique |
En lisant les poèmes de La Guirlande, nous avons essayé d'en extraire les quelques vers qui palpitaient encore.
Bien sûr, c'était tricher. Monter en épingle un détail, c'était dans un linceul broder une dentelle. Pas étonnant si encore une fois celle-ci était noire.
Ces quelques vers, extraits de longs poèmes d'eau tiède,nous y retrouvions encore l'écho des fulgurances Baroques, des éclairs de Nerval.
Mais toujours la guirlande s'effritait, perdait des plumes et des fleurs.
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Dentelles noires pour Précieuses |
Quelques vers :
Si l’on vous donne un lys,
un œillet, une rose
Luisez, astre vivant, dessus
ma dernière heure,
Une jalouse ardeur ordonne
que je meure,
Pour un second Soleil, une
seconde fois.
Je suis l’Amante, et l’Image
Les Tulipes sont effacées
Mes beautés ont de la
constance
Dans l’Empire fameux de
Flore et de Pomone
Mon père a mille enfants qui
portent la Couronne
Je vis pure, et dans la
froideur
Accordez-moi le privilège
D’approcher de ce front de
neige
Et si je suis placé (comme il est à propos)
Auprès de ces Soleils que le Soleil seconde
Je leur donnerai le repos
Donnez-moi vos couleurs,
Tulipes, Anémones,
Œillets, Roses, Jasmins,
donnez-moi vos odeurs
Je vais finir pour
Julie !
Curieux Enfants d’espérance,
Belle troupe de mes amants
La blancheur de ta main
m’est un trône d’ivoire
Je sèche, je languis, je
flétris et je meurs
Je suis si fragile en mon
être
Que je ne puis longtemps
fleurir
Le vent qui les Roses fait naître
Est si fort qu’il me fait mourir.
Je suis plus amoureux de
vous
Que je ne le fus de moi-même
Du rivage inconnu de l’aspre
Corélie,
Où la mer sous la glace est
toute ensevelie
Vainqueur des ennemis et
vaincu du malheur,
Je rencontrai la mort dans
le champ de Bellonne.
Je ne parais que pour ne
plus paraître
Assise en majesté sur un
trône d’épines
Je porte le sceptre des
Fleurs
Roses, retirez-vous, j’ai le
nom d’Immortelle !
Car par moi ton visage est
beau
Alors, que restait-il? Ce pour quoi le monde est fait, disait Mallarmé, un livre ?
Du maroquin, du cuir, du vélin?
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Reliure de La Guirlande de Julie |
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Cuir de reliure, fragments éclatés |
On dirait que ce cuir met les voiles, poussé par le zéphyr qui ouvrait le livre.
C'est à peine s'il retient sous sa peau quelques mots bleus de La Guirlande.
En tout cas la guirlande s'effritait encore, perdait des plumes et des fleurs.
Vanité des vanités. Julie d'Angennes est peu à peu devenue une Madeleine qui pleure sur les souvenirs de ses splendeurs perdues.
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La modeste violette de La Guirlande de Julie |
Rappel :
Tous les livres de la collection PARCE QUE! se présentent sous un format 17 x 17 cm (pour les amateurs, celui des 45 tours vinyl).
Un coffret en aluminium et plexiglas cristal permet deux "utilisations". On peut, au choix, s'en servir comme d'un livre, les lire, les feuilleter, les ranger sur les étagères d'une bibliothèque. Ou bien, les afficher au mur comme un tableau.
En effet, la couverture est occupée à chaque fois par une illustration pleine page ne portant ni lettrage, ni marque de reliure.
Le tirage se fait sur papier Japon Awagami Hosho.
La reliure est du type 'à la chinoise', chaque feuillet étant doublé par un pliage sur lui-même, les fils de reliure sont masqués par les pages de titre et de frontispice.
Le tirage se fait sur papier Japon Awagami Hosho.
La reliure est du type 'à la chinoise', chaque feuillet étant doublé par un pliage sur lui-même, les fils de reliure sont masqués par les pages de titre et de frontispice.
Le
tirage est de 20 exemplaires, ce qui, ôtés les
exemplaires d'auteur et d'éditeur, correspond à 10 EXEMPLAIRES
DISPONIBLES .
Tous les exemplaires sont, bien sûr, numérotés et signés. Adresse : barral.guy@neuf.fr
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